Mattwaldhorn : traversée NW-SE Alpes valaisannes cartographie: OFT 1308, 1309 conditions bonne, terrain mixte, ciel bleu, cotation: PD III style: alpin Gspon - Wyssgrat - Simelihorn - Mattwaldhorn - Simelipass - Grüen Wengji - Fletschhornhütte - Mattwaldalpa - Siwibode - Siwine - Matt - Saas Balen dénivelé: [+1686] [-2090] 3776m 32ptsar [03-02-2024 09:20] -Gspon(1890m) [03-02-2024 10:38] -Mälachji(2370m) [03-02-2024 12:05] -Wyssgrat (2886m) [03-02-2024 12:29] -Lägundo Tschuggo Pass (2781m) [03-02-2024 14:28] -Simelihorn (Galenhorn) (3124m) [03-02-2024 15:54] -Mattwaldhorn (3245m) [03-02-2024 16:29] -Simelipass (3023m) [03-02-2024 17:23] -Grüen Wengji : pointe W(3117m) [03-02-2024 17:48] -Grüen Wengji : collet(3026m) [03-02-2024 18:25] -Grüen Wengji : sommet E(3105m) [03-02-2024 18:45] -Fletschhornhütte(3041m) REFUGE [04-02-2024 08:40] -Fletschhornhütte(3041m) [04-02-2024 10:00] -Mattwaldalpa : pont Rotgufer(2191m) [04-02-2024 10:24] -Siwibode(2244m) [04-02-2024 11:07] -Siwine(2073m) [04-02-2024 11:49] -Matt(1790m) [04-02-2024 12:23] -Saas-Balen(1486m) [Gspon|03-02-2024 09:20] - A force de zieuter les webcam de Saas-Grund et d'y voir des conditions absolument sèches, je décide de tenter une hivernale. Je prévois d'aller jusqu'au Lagginhorn par la Sengchuppa et le Fletschhorn. C'est bon, je connais la route ;) 8h57 : J'embarque dans la nouvelle cabine de Gspon, bien moins bucolique, mais moderne. De Gspon, je rejoins le pied de la piste du téléski, puis remonte au sud de la rive gauche de la piste, dans la forêt, sans raquettes, vers Scheidbode, puis rejoins la piste pour le dernier lacet de la piste bleue. [Mälachji|03-02-2024 10:38] - Au haut du téléski, je retrouve le type qui était avec moi dans la cabine avec un pote qui a dû le rejoindre quelque part. J'ai déjà 300m dans les jambes et je sais que j'irai moins vite qu'eux en raquettes. Mais j'irai plus loin ;) Au point de vue Mälachji, on discute le coup, en français (ce doit être des français), après qu'ils aient cru que j'étais du coin. Ils veulent aller au Simelhorn. Ils s'enquièrent du Mattwaldhorn, quand je leur dit que j'y vais. Je les vois surpris lorsque je leur dit qu'il y a un petite descente depuis la Wyssgrat et que ça a l'air tout en caillasse. Ils me disent qu'ils vont déjà aller au Simelihorn et ensuite qu'ils verront. [Wyssgrat|03-02-2024 12:05] - Dans la montée, un couple qui étaient dans la même cabine s'enguirlande en suisse-allemand. Il s'énerve parce qu'elle a un peu peur et ne fait pas ses conversions juste, d'après lui. Il lui hurle "links Stock ist falsch!" En köbi, avec les "kr", c'est violent. Après la chaleur de la montée, un vent glacial au sommet. J'arrive juste 6-7 minutes après les deux skieurs. A mon avis, ils pensent être au Simelihorn. Je ne dis rien. Ils me demandent des conseils pour rejoindre la pente d'en face (sous l'Ochsehorn). Ils n'ont pas l'air de vraiment connaître. Je ne sais pas ce qu'ils auront décidé. J'ai continué ma route. [Lägundo Tschuggo Pass|03-02-2024 12:29] - Enfin la solitude. Petite descente d'encore 50m dans le creux pour rejoindre l'épaule nord toute déneigée. Je pensais me faire un bon pique-nique à l'abri et au soleil, posée sur un caillou, mais le vent est toujours assez fort et glacial ici. Voilà pourquoi il n'y a pas de neige. Je me poserai plus haut. [Simelihorn (Galenhorn)|03-02-2024 14:28] - Pas de vent ici, une vue splendide sur tous ces sommets déjà traversés. Quelle émotion de les revoir! Je zoom sur la Sengchuppa : tout en glace et en rocher! Plus de trace de la belle coupole neigeuse! Demain, il me faudra remonter l'arête NW qui monte du Bergenerloch. Bon, je n'allonge pas trop la pause, car j'ai encore du chemin. [Mattwaldhorn|03-02-2024 15:54] - Petite descente puis remontée sur le Mattwaldhorn. Bien sèche, mais je garde les raquettes, pour ne pas enfoncer dans les passage neigeux. 16h le sommet. J'en profite pour repérer le Nanztal tellement encaissé qu'il a gardé sa neige jusque assez bas. Faut que je m'active, d'ici 1h30 il va faire nuit et depuis ici, il reste un bon bout à descendre tout en traversée. Les pentes sud sont bien ramollies, ça va être tord-chevilles. Depuis le Wyssgrat, j'ai repéré une trace de pas sans raquettes. Elle doit dater de quelques jours. Il a pris le même itinéraire. Du Mattwaldhorn, il a suivi l'arête SE. Je la suis aussi, comme la dernière fois que je l'ai faite en 2011. [Simelipass|03-02-2024 16:29] - Le gars a continué sur l'arête. J'hésite à descendre, c'est glissant dans cette neige molle et sans les raquettes, je risque vraiment de m'embourber. Je me dit que ça doit passer facile sur cette crête avec quelques passages rocheux. Grimper un peu sera plaisant et je n'aurai pas besoin de remonter jusqu'au refuge, j'arriverai juste au-dessus. Cette perspective me plaît, je m'engage sur l'arête. [Grüen Wengji : pointe W|03-02-2024 17:23] - En bien, ce n'est pas une mince affaire! Depuis un moment, j'ai retiré mes raquettes, ce n'était plus très commode. Il y a quelques gendarmes assez simples à grimper, mais pas à descendre. Le type aux pas de géant (il devait courir, ma parole) avait l'air de bien connaître. Il a évité les pièges(impossible à voir avant d'y grimper, pour s'apercevoir qu'il y a un ressaut de l'autre côté) Je me laisse prendre une fois, car son contournement dans le versant sud bien raide était craignos. Je n'ai pas voulu mettre les crampons et la neige à commencé à durcir. Un splendide nuage de foehn gris foncé chapeaute le Fletschhorn et le Lagginhorn et tout est éclairé par le soleil couchant. En face, les Mischabel sont dans l'ombre et de l'autre côté du Valais, l'Oberland luit merveilleusement. Heureusement que le spectacle est beau, je commence à en avoir plein les gambettes. [Grüen Wengji : collet|03-02-2024 17:48] - Dans la descente au collet, les derniers rayons. Il n'y a plus que le nuage de foehn qui est éclairé. Alors que je commence à désespérer tant c'est long, j'assiste au spectacle des lumières : le nuage se colore de rose, puis d'orange et enfin de rouge. Cette beauté me remonte le moral. Je sors ma lampe frontale du sac, je sais que je vais me faire prendre par la nuit avant le refuge. [Grüen Wengji : sommet E|03-02-2024 18:25] - Ma lampe est morte. Elle s'allume, puis clignote trois fois, puis s'éteint. Je n'avais pas enclenché la sécurité et l'ai retrouvé avec la lampe rouge arrière allumée, en la sortant du sac. Je ne sais pas si la batterie est à plat ou si elle a un problème de connexion de câble, ce qui m'est déjà arrivé. Peu importe, il fait bien nuit et je devine à peine les traces du type (heureusement) qui avait l'air de courir encore plus (il s'est peut-être trouvé aussi dans mon cas et a dû presser le pas). Les écart sont de plus en plus grands, parfois il a dû sauter! A un endroit, près d'un bloc, il est passé dans un trou bien profond, il a dû se faire mal. Je me retourne et vois soudain des lumières au niveau des lagots, au bon bout plus bas. Oui, ce sont bien des lampes frontales, ça bouge. Je ne serai pas seule, mais dans un sens tant mieux. [Fletschhornhütte|03-02-2024 18:45] - Enfin le refuge. Il y fait nuit bien sûr. Ma lampe qui accepte de s'allumer deux secondes à chaque pression sur le bouton me permet de trouver des bougies. Je me fais bouillir de l'eau sur le brûleur à gaz mis à dispo dans l'entrée. Je renonce d'abord à allumer le potager. Il n'y a que des grosses bûches et il ne fait pas trop froid à l'intérieur. Mais finalement, je tente avec mon allume-feu, me disant que se sera plus agréable pour les arrivants. Il prend nickel! Deux gars débarque avec les skis, contents d'arriver enfin. Ils parlent français et anglais, un aussi l'allemand. Nous optons pour l'anglais. Tant qu'ils ont leurs chaussures, je leur demande de prendre de la neige pour faire fondre, ce qu'ils font, très contents de mon idée. Ils ont fait le même tracé que moi, sauf que du Simelihorn, ils sont descendus dans la combe au lieu de prendre l'arête. Normal, avec les skis. Ils n'avaient pas pensé que ce serait si long. Ils me remercie d'avoir "préparé" le refuge. Ils sont deux jeunes doctorants (uni et EPFL), très sympas. Nous passons le reste de la soirée à discuter montagne. Je leur fait part de mon projet initial. Vu la panne de lampe qui m'empêchera de partir assez tôt (le croissant de lune est fin) et le vent glacial qui balaie les arêtes, je pense abandonner. J'en ai eu assez aujourd'hui, avec mon peu d'entraînement. Ils me trouvent raisonnable, mais sont impressionnés. Ils envient mon expérience, sans savoir que j'envie leur jeunesse. Enfin surtout, le temps qu'ils ont devant eux et leur énergie. Je me couche assez tôt, au cas où il me prendrait de partir à l'assaut quand même. Dans le dortoir, j'ai ouvert les volets pour pouvoir regarder dehors. J'ai vue sur le Fletschhorn. Je ne parviens pas à m'endormir, le poêle n'a pas eu le temps de chauffer la mezzanine. Il fait froid et je n'ai que les couvertures militaires. Stephan et Yusef ont été totalement silencieux pour respecter mon sommeil et sont montés au lit en toute discrétion. Ils ont été plus malins en prenant leurs sacs de couchage d'hiver. J'avais été exprès au WC avant de monter me coucher. Ils sont loin les WC et on ne peut pas y aller en crocs, il faut remettre les chaussures et affronter le vent. A peine se sont-ils couchés que j'ai dû me relever par un besoin pressant. J'avais beaucoup bu le soir, car la journée de 10h avec un litre m'avait assoiffé. De retour au lit, même topo, j'attends le sommeil. Je n'ai pas osé regarder l'heure, mais j'ai dû m'endormir vers deux heures. [Fletschhornhütte|04-02-2024 08:40] - Me suis réveillée vers cinq, encore temps pour y aller, mais l'envie n'y est plus. Cette histoire de lampe... et le vent. Comme les jeunes rentrent et voulaient profiter de dormir un peu, j'ai fait comme eux. Nous avons attendu le jour vers 7h30. Nous avons déjeuné ensemble tranquillement. Je leur ai prêter mon réchaud pour faire de l'eau et j'ai lavés nos tasses, mon bol et la table. Pendant ce temps, ils ont pliés toutes mes couvertures au dortoir. Adorables. Si seulement, on trouvait plus de cette ambiance d'entraide en montagne. Une fois bien équipés (le vent congèle toujours dehors), on s'est quitté avec émotion sur quelques paroles de remerciements réciproques et de bonne chance. Be safe, j'ai dit, les larmes aux yeux. [Mattwaldalpa : pont Rotgufer|04-02-2024 10:00] - Descendue en suivant des traces de skis et aussi en visant l'angle gauche du vallon. On dirait que c'est régulièrement couru par là. J'ai revu les traces de pas du gars! Il faisait moins le malin sans raquettes, il s'est bien enfoncé. Toujours ses traces de lièvres qu'on ne voit jamais, qui vont d'un tapis gazonné abrité au pied d'un bloc à un autre bloc. Tellement touchant. Mais qu'est-ce qu'ils peuvent bien trouver à manger ? Je laisse quelques amandes et fruits secs sur le pas de porte. Juste après le pont, je vois un gars, un fille qui débarque à skis de je ne sais où. [Siwibode|04-02-2024 10:24] - Ici, de nouveau le vent, le soleil chauffe quand même bien. C'est à l'herbe. Je déchausse mes raquettes, en espérant trouver un sentier pas trop glacé. [Siwine|04-02-2024 11:07] - J'ai encore croisé un type qui remettait ses skis après un long bout de portage. Monter par ici avec les lattes, faut être motivé. Bon, en même temps, c'est certainement plus court aussi. Quels beaux alpages par ici. Je fais une pause au soleil, quel bonheur. [Saas-Balen|04-02-2024 12:23] - Me voilà à Saas Balen. Je regarde l'horaire de bus pour revenir à Stalden. 12h31! Le timing parfait. J'ai chaud ici, je suis en pull. Une dame du village attends aussi le bus, elle porte une veste matelassée zippée jusqu'au cou. Je profite encore de ces minutes suspendues... je flotte encore là-haut, ici, nulle part. |
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